vendredi 25 mai 2018

Cortège de tête du 26 mai










Gaza, Zone à Défendre

Appel à un carré contre l’impérialisme et pour le peuple palestinien au sein du cortège de tête de la manifestation du 26 mai 2018 à Paris.


Pourquoi un carré contre l’impérialisme et pour le peuple palestinien au sein du cortège de tête ?

D’abord parce que nous sommes au lendemain d’un massacre du gouvernement israélien dans la bande de Gaza : une cinquantaine de morts lors d’une Grande marche du retour du 14 mai et des centaines de blessés par balles. Ces massacres sont la conséquence funeste d’une répression sans précédent de manifestations pacifiques, organisées depuis plusieurs semaines par la société civile palestinienne à Gaza. Ces démonstrations de courage et d’héroïsme populaires, ces familles qui tentent de franchir les frontières imposées unilatéralement par Israël, de braver le blocus qui frappe Gaza, sont le fruit d’une campagne menée depuis le mois de mars pour faire valoir le droit au retour des Palestiniens expulsés de 1948, année de la création de l’État d’Israël et de l’épuration ethnique des zones colonisées.

Au-delà de l’émotion et de l’indignation à l’égard de la barbarie israélienne, à l’égard de l’impunité dont jouit Israël à l’échelle internationale, nous affirmons la centralité de la question palestinienne pour notre autonomie. La Palestine est un symbole de dignité, d’une résistance sur la durée et d’une identité politique qui traverse les pays, les religions et les régions au Moyen-Orient. Nous nous reconnaissons dans cette lutte multiforme, parfois pacifique et parfois offensive, ces maquis dispersés dans les camps de Jordanie en 1968, puis aux côtés des progressistes et des chiites libanais dans les années 1970, ces comités populaires organisant l’intifada dans les territoires occupés ou encore les marées populaires à Gaza ces dernières semaines. Pour nous, la Palestine n’est pas simplement une lutte étroitement nationaliste ou religieuse. C’est un combat qui a été le fer de lance des luttes révolutionnaires dans le monde arabe, mais aussi un enjeu majeur des luttes de l’immigration et des quartiers populaires en Europe. Parce que, depuis 1948, les Palestiniens ont été expulsés et ont été installés dans une multiplicité de camps au sein du monde arabe, parce les révolutionnaires du Nord global, après 1968, ont noué leur solidarité combattante avec la Palestine, l’antisionisme est une lutte sur autant de fronts.

Il ne faut pas non plus oublier qu’Israël n’est pas un État comme un autre. Pays sans frontières assignables, conquérant, qui gagne du terrain par l’expulsion et la spoliation des Arabes de Palestine, c’est une ethnocratie biberonné en dollars et en appui logistique et militaire occidental. Dans le partage colonial du Moyen-Orient de l’entre-deux guerres, c’est une pièce maîtresse de la stratégie de division et de morcellement des classes populaires de la région. Cooptation des élites arabes et soutien au foyer national juif ont été les deux faces de la même pièce. Du soulèvement populaire de 1936 aux effervescences panarabes en Égypte, en Irak, en Syrie, au Liban, c’est la question de la Palestine qui a toujours su briser les alliances contre-natures entre sionisme et réaction arabe. La lutte pour la Palestine est donc aussi le principal vecteur d’une recomposition progressiste des identités confessionnelles et des opprimés au Moyen-Orient.

Aujourd’hui, nous sommes à la veille d’un tournant historique. L’Arabie Saoudite de Salman, l’Amérique de Trump et le gouvernement de Netanyahou cherchent à imposer le deal du siècle aux Palestiniens, un accord de paix impliquant l’abandon de Jérusalem, un État palestinien dans la bande de Gaza et circonscrit à une petite partie de la Cisjordanie - sous patronage militaire d’Israël. Autrement dit, Trump a mis à l’ordre du jour un processus de liquidation de la question palestinienne : il propose ni plus ni moins aux Palestiniens d’abandonner leurs revendications historiques, notamment leur « droit au retour ».

Dans nos milieux autonomes, dans le mouvement social, il y a aussi un risque de liquidation de la question palestinienne. Notre anti-impérialisme est trop souvent caricaturé, simplifié à une lutte binaire entre le Nord et le Sud, voire à un « campisme » solidaire de tel ou tel tyran au nom de son soutien verbal à la cause palestinienne ou à l’anti-américanisme. Il nous faut réaffirmer l’importance stratégique d’un combat anti-impérialiste pugnace.

En premier lieu, l’anti-impérialisme est une lutte contre notre État, contre ses dispositifs sécuritaires, ses partenariats militaires ; cette lutte n’est pas criminalisée par le pouvoir par hasard : de la circulaire Alliot-Marie réprimant le mouvement BDS (Boycott, désinvestissement et sanctions contre Israël) aux manifs interdites de 2014, l’État français défend sa vieille politique impériale au Moyen-Orient contre les mouvements de solidarité et contre les quartiers populaires en France.

Pour nous, Gaza est une zone à défendre. Zone assiégée, sous blocus économique et militaire, c’est aussi une zone libérée, dont la résistance a su imposer l’évacuation aux forces réviso-sionistes. C’est un bastion de la résistance que les Israéliens n’ont pas réussi à « nettoyer » en 2008 et en 2014 malgré des bombardements intensifs. Les « tunnels du Hamas » n’ont pas été démantelés.

Pour notre autonomie, la lutte palestinienne traduit aussi le courage de la durée et de la fidélité au combat. Pour la première fois depuis 70 ans d’existence, Israël perd des batailles décisives : elle perd sa prégnance militaire exclusive dans la région ; elle a perdu les batailles du Sud-Liban et de Beyrouth en 2000 et 2006 ; elle essuie quotidiennement des opérations militaires dans les colonies. Peut-être que le « printemps gazaoui » est le prélude d’une intifada vigoureuse dans tous les territoires palestiniens. Leur intifada est aussi la nôtre. Elle est une école de l’inventivité populaire et d’une cohésion offensive.

Aux côtés des « Quartiers en cortège de tête », marchons contre la liquidation de la question palestinienne.

Du cortège de tête à l’intifada gazaouie, solidarité !

#26MaiPimenté
https://paris-luttes.info/cortege-de-tete-du-26-mai-gaza-10299


COMMUNIQUÉ DU COLLECTIF DE PHOTOGRAPHES LAMEUTE SUITE AUX ARRESTATIONS DU 22 MAI


LaMeute·mercredi 23 mai 2018

« Se mobiliser est devenu un crime, en témoigner fait maintenant de nous des complices »
La manifestation du 22 mai 2018 à Paris s’est retrouvée marquée par l’arrestation de 24 personnes, après une série de gazages, de matraquages et de violences policières inouïes et démesurées. Des arrestations prenant pour cibles principalement des jeunes, étudiant.es, lycéen.nes, qui n’avaient souvent pour seul tort que celui d’être là, et d’avoir de quoi se protéger des gaz. 101 personnes supplémentaires furent arrêtées à l’occasion de l’occupation du Lycée Arago à la fin de la manifestation. La quasi-totalité de ces personnes ont été placées en garde-à-vue, et on demeure au moment de la rédaction de ce communiqué sans grandes nouvelles d’une bonne partie d’entre elles.
Parmi ces arrêté.es, des photographes dont Stuv, membre de notre collectif.
Depuis l’hiver, et plus profondément encore depuis le 22 mars 2018, le gouvernement s’est empêtré dans un mouvement de convergence des contestations sociales. Mouvement que nous avons jusqu’ici couvert, dès octobre 2017 avec les premières manifestations étudiantes contre la sélection, ou depuis mars 2018 avec la mobilisation cheminote. Des mobilisations au cours desquelles nous avons dû assister à des scènes de violences contrastant sans équivoque à celles dépeintes quotidiennement par les autorités. Des violences policières systématisées, répressives, vouées à un étouffement total de la contestation ; droit fondamental parmi les droits fondamentaux. L’emploi systématique de gaz CS (dont la dangerosité chimique est supposée par les Street Medics), les grenadages et matraquages non-réglementaires au niveau du visage, la rétention systématisée de foules entières pendant plusieurs heures, l’arrestation arbitraire de manifestant.es, les contrôles au faciès aux abords des manifestations, les vices de procédures lors des garde-à-vue, l’omniprésence policière lors des défilés voulus et affichés comme pacifiques, la dissimulation des matricules des agents de police empêchant de fait tout recours judiciaire… Telle est la liste non-exhaustive des contraintes à la prétendue « liberté d’expression », enjeu politique et cheval de guerre des factions de gauche comme de droite depuis 2015. Car, sur une temporalité restreinte, c’est à la mise en place de l’état d’urgence pendant près de deux ans puis l’inscription de certaines de ses mesures répressives dans le droit commun qu’il faut imputer la dégradation actuelle du droit de manifester.
Il n’y a personne en France, en 2018, qui ne puisse se vanter d’avoir manifesté récemment sans avoir eu le goût âpre et brûlant en bouche des gaz lacrymogènes. La « Génération Macron » est une « Génération CS », et nous, photographes, en sommes les témoins. Car dans un pays où l’on envoie la Brigade Anti-Criminalité (BAC) encadrer des manifestations syndicales, un seul constat semble s’imposer, lourd de toute sa gravité : se mobiliser est devenu un crime, en témoigner fait maintenant de nous des complices. Sans aucune comparaison possible tant le degré de violence à l’encontre des manifestant.es est élevé, les Journalistes Reporters d’Images (JRI), spécialement les indépendant.es, sont victimes d’une intimidation policière systématisée. Contrôles d’identité, confiscation de matériel de protection (ce qui empêche par exemple de montrer ce qui se passe sous les épais nuages de gaz), insultes infondées… C’est le lot quotidien de celles et ceux qui cherchent à montrer ce qui se passe dans les rues. Et si les forces de l’ordre sont capables d’infliger de telles entraves au travail de celles et ceux qui témoignent, que déduire alors de ce qui est infligé à celles et ceux qui luttent ? La liberté d’expression est indissociable de la liberté de la presse, et l’une sans l’autre est incomplète. Il n’y a pas de liberté d’expression là où les journalistes sont muselé.es. Il n’y a pas de liberté de la presse quand la contestation y est absente. En France, et ce depuis 1881, la profession de journaliste n’est pas réglementée, dans le but initial de garantir sa liberté. Pas donc besoin de « carte de presse » (dont ne disposent que 50% des photographes de presse, via leur activité salariale principalement), il n’y a dès lors rien qui ne puisse justifier cette garde-à-vue de Stuv.
Prenant acte de tout ce qui a été énoncé, et au regard de ce dont nous avons été témoins jusqu’ici, nous affirmons notre soutien à tou.tes les interpellé.es du 22 mai, et condamnons le caractère arbitraire et souvent injustifié de ces interpellations. Nous y voyons une dérive autoritariste toujours plus alarmante d’un gouvernement qui se refuse à prendre en compte la contestation sociale à son encontre, étendant aux journalistes la violence déjà bien installée envers les manifestant.es. La répression ne saura apparaître comme autre chose qu’un aveu de faiblesse de la part du gouvernement, et nous poussera toujours plus à réaliser notre travail d’information.
Libérez-les !
Libérez Stuv !
Le Collectif LaMeute Photographie

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